Quand l’ANSM alerte sur les dangers du CBD acheté sur Internet
Edito. L’ANSM a lancé cette semaine une alerte concernant l’utilisation de produits au cannabidiol (CBD) achetés « en dehors du circuit légal », notamment pour soigner les enfants épileptiques. L’agence sanitaire a eu connaissance d’une augmentation « inquiétante » des achats de produits CBD par Internet notamment et rappelle que la qualité et la sécurité de ces produits ne sont aucunement garanties. La faute à qu(o)i ?
Le circuit légal
L’ANSM rappelle en l’occurrence que, depuis le début du mois de décembre 2018, des Autorisations Temporaires d’Utilisation (ATU) sont disponibles « de façon temporaire et nominative » pour l’Epidiolex, un médicament utilisé dans des cas d’épilepsie sévère comme les syndromes de Lennox-Gastaut et de Dravet. Les patients qui souhaiteraient y avoir accès doivent néanmoins passer par une procédure administrative extensive et obtenir au préalable l’aval de leur médecin. En outre, la procédure d’ATU est extrêmement réglementée et surtout, est exceptionnelle et ne dure qu’un an. Le patient doit avoir épuisé toutes les autres options de traitement et utiliser l’Epidiolex en dernier recours. Voilà en somme à quoi ressemble le fameux « circuit légal ».
Sur Internet les patients peuvent faire l’acquisition d’huile de CBD en trois clics. Rappelons que l’Epidiolex n’est ni plus ni moins qu’une huile de CBD avec un dosage précis et constant, et un circuit de contrôle sanitaire sûr.
L’ANSM recommande ainsi de ne pas acheter de produits sur Internet pour un usage médical car cette acquisition se fait au mépris du contrôle qualité et du suivi médical professionnel. Cette dernière reconnait d’ailleurs l’intérêt du CBD dans le traitement de l’épilepsie mais alerte sur les dangers potentiels d’interactions toxiques avec d’autres médicaments antiépileptiques. L’Epidiolex n’est ainsi à prendre, selon les critères d’octroi de l’ANSM, que comme traitement adjuvant avec d’autres antiépileptiques.
Qu’attend l’ANSM ?
Si cette tendance va croissante, plusieurs questions se posent néanmoins, notamment sur les conditions d’accès au cannabis médical en France. Alors que l’ANSM bloque par exemple la mise à disposition du Sativex, et n’a mis l’Epidiolex à disposition que par ATU, est-elle la mieux placée pour se plaindre des patients qui cherchent des solutions immédiates pour se soigner ?
Pourquoi conserver une procédure exceptionnelle et rédhibitoire qui privent beaucoup du suivi médical adéquat ? Pourquoi, plus largement, laisser les patients dans le besoin recourir au circuit illégal pour acheter du cannabis ? Et si le CBD aide effectivement certaines personnes, malades ou non, pourquoi finalement ne pas mettre en place une régulation officielle avec les autorités concernée pour distinguer des produits bien-être accessibles à tous par Internet et en boutique des produits médicaux accessibles par ordonnance ?
Si la chasse aux boutiques de CBD a pu avoir un effet, c’est probablement de pousser leurs clients à aller s’approvisionner sur Internet, sans avoir forcément le conseil nécessaire autour de l’utilisation des produits, dont la provenance pour certains peut être obscure. Une régulation du marché permettrait en outre à ceux qui ont d’ores et déjà décidé de se passer de l’encadrement médical d’avoir accès à un produit sain et sûr. La recherche pourrait aussi en bénéficier, avec des études nationales sur le potentiel médical du CBD, les dosages adéquats et les interactions médicamenteuses.
Le cannabis médical est déjà légal dans 21 pays de l’Union Européenne, la Suisse, la Norvège, Israël et la Turquie et dans la majorité des Etats américains. Même en France sa valeur thérapeutique est reconnue pour les douleurs neuropathiques (Marinol), la sclérose en plaques (Sativex) et l’épilepsie (Epidiolex). Pourtant, son accès est toujours difficile voire impossible pour certains. Selon NORML, en décembre 2017 et depuis 2001, seulement 74 ATU nominatives ont été délivrées pour le Marinol®.
Quant au Sativex, il est légal mais doit être importé, à des coups prohibitifs pour certains patients car pas commercialisé en France. Enfin, les patients qui entreprennent de se soigner seuls sont traités comme des criminels. Cette situation pose une véritable question d’éthique vis-à-vis de l’accès aux soins.
Tout n’est pas noir non plus : la France a tout de même entamé des démarches dans le sens d’une ouverture de l’accès au cannabis médical sous forme de plante et ses dérivés. Bien que le raisonnement sur la pertinence du cannabis médical de l’ANSM n’ait pas encore ouvert concrètement l’accès au cannabis médical, c’est un premier pas. Une modernisation des procédures ATU visant à les simplifier est également en vigueur depuis septembre 2018.
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