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11 alternatives à la prohibition du cannabis

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Le débat sur le cannabis se résume souvent entre l’opportunité de prohiber ou de légaliser, faisant de fait oublier que la légalisation se décline en de multiples modèles. Les alternatives à la prohibition du cannabis se déclinent pourtant en de nombreuses possibilités, listées et expliquées ci-dessous.

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Alternatives à la prohibition du cannabis

Les alternatives à la prohibition du cannabis

1. La dépénalisation

La prohibition pure et dure a eu certains effets pervers par exemple aux Etats-Unis où elle a conduit à la discrimination disproportionnée de certaines communautés ethniques pour une simple conviction de possession de cannabis. La dépénalisation du cannabis se présente ainsi comme une solution modérée qui maintient le statut illégal de la plante tout en supprimant la répression du consommateur. Elle se traduit le plus généralement par la tolérance envers la consommation et la possession de petites quantités de cannabis mais une certaine rigueur pour son commerce. Elle permet de concentrer ainsi les efforts de police sur la lutte contre le trafic plutôt que sur les consommateurs.

Cette solution a pour avantage de réduire les coûts associés à la prohibition pure et dure tels que les coûts financiers, administratifs, judiciaires et pénitenciers, en faisant baisser de manière significative les arrestations pour les petites infractions liées au cannabis. En revanche, en l’absence de business cannabique légal et de taxation, le gouvernement n’en retire aucun bénéfice financier, qui revient totalement au marché noir. Pour l’instant c’est le choix pour lequel a opté un large nombre de pays.

2. L’auto-culture

C’est un modèle peu en vogue par lui-même car il n’apporte aucun bénéfice à l’État si ce n’est qu’il supprime certaines dépenses policières liées à la lutte contre le cannabis. L’auto-culture est un modèle où le consommateur se responsabilise seul face à sa consommation, à la qualité et à la quantité du produit. L’Etat impose en général des limites de culture mais doit pour cela débloquer des moyens policiers pour s’assurer qu’elles soient respectées. C’est une solution réputée efficace contre le marché noir mais, en réalité, la disponibilité immédiate du cannabis sur le marché noir est souvent plus attrayante que de passer par le long process de faire pousser soi-même ses plantes. Le marché noir s’en retrouve peu impacté. Au contraire, ce modèle est susceptible de l’alimenter. L’auto-culture est autorisée ou tolérée dans un certain nombre d’Etats américains, comme l’Alaska et Washington DC, et est plutôt utilisé en complément d’une légalisation plus classique, régulée par l’Etat. A ce jour, le Vermont est le seul Etat à avoir légalisé en n’autorisant que l’autoculture et le don de cannabis.

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3. La culture en coopérative

Le modèle de culture par des coopératives citoyennes ressemble à l’auto-culture mais garantit un cadre plus transparent : les organisations doivent garantir une certaine traçabilité du produit et de leurs activités à l’Etat et à leurs membres. Les organisations fonctionnent à partir d’un règlement intérieur qui garantit une certaine éthique et sont des associations non lucratives. C’est le modèle des Cannabis Social Clubs en vogue en Espagne et au Royaume-Uni (bien qu’ils soient illégaux dans ce dernier). Les consommateurs apprécient ce modèle communautaire et responsable dont le but n’est pas d’accumuler le profit. En revanche, pour l’État, il n’est pas très lucratif bien qu’il puisse exercer une taxe.

Ces organisations souffrent cependant d’un problème récurrent de surproduction et n’ont pas le droit de vendre le surplus. En revanche, en comparaison avec la simple autoculture, cette méthode a le potentiel de réduire significativement le marché noir et confine la production à des techniques artisanales tout en protégeant des éventuels méfaits d’un marché libéralisé propice aux fluctuations. En termes de publicité et d’« incitation », les Clubs sont des solutions sans grand danger puisque l’échange est restreint aux membres. Ils peuvent ainsi contrôler et empêcher l’accès des mineurs au produit.

4. La vente au détail seulement

Ce modèle correspond au célèbre modèle hollandais dans lequel la possession et la consommation de cannabis sont autorisées mais le produit ne peut être vendu que dans des magasins prévus à cet effet qui doivent répondre à certains critères et respecter certaines règles comme les limites de quantité et l’interdiction de la publicité. Il a pour avantage d’éliminer les coûts de la prohibition mais présente cependant certaines incohérences : aucun contrôle de qualité n’est effectué et la marchandise vient du marché noir qui devient légale une fois franchie la porte magique des coffees. Ce modèle alimente donc le trafic illégal et n’apporte aucun bénéfice à l’État qui ne taxe pas l’industrie, qui dépense des moyens pour l’inspection des régulations et qui se retrouve confronté, dans le cas de la Hollande, à un tourisme cannabique de masse.

5. Un monopole d’Etat

Un monopole d’État permet à ce dernier d’avoir un contrôle absolu sur la chaîne d’approvisionnement du cannabis. Il garantit qu’aucun segment de la production n’alimente le marché noir et minimise donc le détournement du produit. C’est également un modèle réversible adapté à des périodes d’essai car il est facile de passer ensuite à un modèle de distribution privé, l’inverse étant presque impossible. C’est le modèle qu’à choisi la province du Québec au Canada. Aux Etats-Unis c’est un modèle impossible tant que le cannabis est interdit au niveau fédéral.

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Le gouvernement n’a pas à surveiller constamment des entreprises privées qui essayeraient de contourner la contrainte des régulations. Ce modèle garantit l’absence de publicité et d’innovation qui incitent à la consommation même si la publicité peut aussi fournir des informations permettant aux consommateurs de trouver le produit qui leur convient. En termes de services clients, on peut également émettre des réserves. Ce modèle est immunisé contre les fluctuations du marché et garantit des prix fixes. Les prix doivent en revanche être compétitifs et la production assez diversifiée pour répondre aux besoins des clients et faire disparaître le marché noir.

6. un quasi-monopole d’Etat

Le modèle de quasi-monopole équivaut au monopole et apporte les même bénéfices mais l’État agit par le biais d’une autorité publique, une agence, qui serait la seule productrice et fournisseuse de cannabis. Cette agence fixerait les prix, engagerait du personnel pour la vente et la production etc. Cette solutions épargne à l’Etat la tâche d’écrire des régulation et des lois de taxes, de donner des licences, d’engager des collecteurs de taxes et des régulateurs tout en garantissant un certain contrôle. La question est : à quelle point cette autorité peut-elle être dépendante de l’État ?

7. Des organisations non-lucratives

Une autre solution pourrait être de n’accorder des licences qu’à des organisations non-lucratives qui opèrent pour l’intérêt public et non pour maximiser leur profit. La limite pourrait éventuellement ne concerner que les organisations de santé publique qui reverseraient les bénéfices de son commerce au traitement des patients, à la prévention et à l’éducation. Cette solution n’est pas plus coûteuse que les solutions classiques puisqu’il s’agit simplement d’imposer un critère sur le genre d’organisation aptes à recevoir une licence.

Cette solution est en général utilisée comme complément d’une autre forme de légalisation. En effet, elle présente un problème de financement. Les organisations non-lucratives fonctionnent sur un modèle de donation ou de crédit, elles n’ont rien à proposer à des investisseurs. Aux Etats-Unis, ce n’est pas un modèle probable car les banques refusent de faire crédit aux organisations en lien avec le cannabis.

8. Des organisations d’intérêt pour la société

Une solution intermédiaire est de choisir des compagnies hybrides qui ont pour ambition de faire à la fois du profit et de servir l’intérêt commun. Certains types de compagnies, en effet, incluent dans leur agenda des objectifs sociaux et ont de ce fait un statut particulier. Contrairement aux organisations non-lucratives, elles peuvent se financer à partir d’investissements. Cette solution semble également plus attrayante que l’option des entreprises classiques qui ne se soucient pas de l’influence de leur publicité et de leur politique tant qu’ils font les chiffres.

9. Un oligopole structuré

Un modèle basé uniquement sur le business et le profit doit en revanche faire l’objet de régulations solides pour ne pas que ces entreprises agissent en contradiction avec l’intérêt public en servant leur intérêt propre. Les régulateurs doivent avoir assez de pouvoir pour assurer que les restrictions en termes de santé publique soient respectées.

Une solution peut être de restreindre et de sélectionner judicieusement le nombre d’entreprises licenciées pour le commerce du cannabis. L’État peut ainsi appliquer les critères qu’il veut et recevoir des honoraires annuelles sur ces licences. Plus elles sont rares et convoitées, plus ces honoraires peuvent être élevés. L’Etat a donc intérêt à ne pas accorder des licences à tout va. L’action des inspecteurs de régulation est facilitée du fait du nombre limité d’acteurs. Cependant, dans ce genre de modèle, les entreprises privilégiées sont souvent les gros bonnets qui ont les moyens de négocier une licence et bénéficie d’un traitement de faveur du fait de leur influence. Certains Etats américains ont tenté de favoriser les petits producteurs et les minorités mais la pression des grands groupes est importante.

10. Modèle commercial standard

Enfin, la solution par défaut en l’absence de réflexion politique sur les possibles alternatives est bien souvent de laisser la production, la distribution et le commerce du cannabis aux mains d’acteurs privés en compétition sur un marché ouvert. Il existe bien entendu des régulations et des lois régissant le marché voire le produit. Les entrepreneurs devront par exemple respecter des standards de qualité, de packaging ou de structure mais le but ultime du marché est de maximiser le profit et cela passe par la création de besoins. En termes de santé publique voire de morale, cette approche peut poser de nombreux problèmes étant donné que le cannabis n’est pas un produit comme un autre et peut entraîner une addiction.

Un autre défaut de cette solution est qu’elle s’accompagne bien souvent d’une situation de monopole. Les grands groupes dominent le marché et leurs bénéfices se chiffrent en millions voire en milliards de dollars. Les petits producteurs locaux sont ainsi écrasés sous la concurrence au fur et à mesure que l’industrie se mondialise. Alors que le marché du cannabis représentait une opportunité nouvelle pour un grand nombre de petits entrepreneurs, ce modèle favorise l’enrichissement des barons de l’industrie traditionnelle qui ont déjà les fonds nécessaires pour des activités de grande ampleur.

11. Aucune régulation

L’autre extrême consiste à simplement supprimer la prohibition sans concevoir aucune régulation. En 2012, cette solution a été envisagée au Michigan mais n’a pas remporté le nombre de signatures nécessaires. Une telle solution peut très vite s’avérer chaotique. Elle autorise même par défaut la consommation par les mineurs. Elle n’apporte aucun bénéfice à l’État et signifie tout simplement un commerce anarchique non régulé et l’absence de considération de santé publique.

Un calcul politique

La légalisation du cannabis est bien souvent le résultat d’une analyse coûts-bénéfices. Il existe bien sûr des coûts liés à légalisation : des coûts financiers et administratifs, dans l’application des régulations par exemple, mais aussi des coûts sociaux et sanitaires, les problèmes d’addiction au cannabis sont bien réels et ne doivent pas être pris à la légère. Mais les bénéfices sont aussi importants : économie de moyens et d’argent relative à l’arrêt de la persécution des consommateurs de cannabis, argent des taxes, plus de justice sociale relative à la discrimination raciale aux États Unis etc.

La légalisation du cannabis n’a jusqu’ici pas fait du cannabis une marchandise comme une autre. En fonction des objectifs politiques que se fixe un État, en fonction de ses priorités, une forme de légalisation peut être plus adaptée qu’une autre. Un rapport de la RAND Corporation, d’où sont tirées les alternatives ci-dessus, nous éclaire à ce sujet, il recense les objectifs, parfois conflictuels, associés à la légalisation:

  • Minimiser les problèmes de santé publique ainsi que les troubles éducationnels et sociaux, en particulier ceux associés avec la consommation de cannabis chez les adolescents
  • Maximiser les revenues de l’État
  • Minimiser les coûts administratifs
  • Minimiser le marché noir
  • Maximiser la liberté privée des personnes adultes, la convenance des consommateurs et les bienfaits du cannabis pour ceux qui en consomment sans addiction y compris pour les malades

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