Comment le Luxembourg et le UK intègrent (ou non) les médecins au programme de cannabis médical
Légalisation du cannabis médical ne rime pas toujours avec disponibilité du cannabis médical. L’exemple le plus flagrant de cette contradiction est sans doute la France qui a légalisé certains médicaments au cannabis mais maintient un accès extrêmement restrictif (et s’inquiète ensuite que les patients achètent sur Internet des produits potentiellement nocifs). La formation des professionnels de santé, l’accès au médicament ou son prix sont autant de facteurs qui peuvent faire que la légalisation reste lettre morte.
La légalisation de surface du Royaume-Uni
Dans la même veine que la France, au Royaume-Uni le cannabis médical est « légal » mais très peu prescrit. Le Royaume-Uni a effectué une légalisation éclair en seulement quelques mois. Cependant, les seuls praticiens habilités à prescrire du cannabis médical (quelques 80 000 médecins spécialistes) ne le font pas par peur de commettre une faute professionnelle. Le cannabis médical étant considéré comme un médicament spécial sans licence, la prescription engage la responsabilité du médecin et, en l’absence de connaissances approfondies et de formation adéquate, les médecins ne sont pas prêts à prendre ce risque.
A l’origine le cannabis devait être rendu disponible pour traiter les symptômes du cancer et de son traitement, l’épilepsie, la sclérose en plaque et les douleurs chroniques. Cependant, le Royal College of Physicians (RCP) et le British Paediatric Neurology Association (BPNA), deux institutions médicales de référence mais conservatrices, ont conclu qu’il n’y avait pas assez de preuves pour l’usage du cannabis dans le traitement des douleurs chroniques et que l’EPIDIOLEX® était à envisager uniquement lorsque toutes les autres options de traitement – chirurgie incluse – étaient épuisées. La grande majorité des médecins appliquent ces directives extrêmement restrictives par commodité et par conformité avec leur corps de profession.
Au sein des hôpitaux publics, High Times rapporte que le personnel de santé a parfois ordre de ne pas prescrire du cannabis médical pour traiter les douleurs chroniques. Cela va directement à l’encontre des recommandations du Comité de Conseil sur l’Abus de Drogues chargé par le gouvernement de préparer la légalisation. Jon Liebling, directeur politique de the United Patients Alliance (UPA), estime que “pour les presque 1,1 millions de patients britanniques, ce n’est pas satisfaisant”. “Nos docteurs ont un devoir de soins que beaucoup semblent négliger en ce moment” ajoute-t-il. Selon Wired, au Royaume-Uni, plus de 30 000 personnes enfreignent la loi pour obtenir leur médicament.
L’absence de formation des médecins
Les associations de patients pointent l’absence de formation des médecins. “Nous avons vu des patient effectivement rejetés des hôpitaux publics et c’est un autre exemple d’à quel point notre corps médical a besoin d’apprendre” explique Jon Liebling. Même Billy Caldwell, un des enfants épileptiques dont le cas médiatisé a précipité la légalisation britannique, s’est vu dans l’obligation de retourner au Canada pour adapter son traitement. Chez les enfants épileptiques, les traitements peuvent atteindre une forme de “plateau” et être de moins en moins efficaces. En l’occurrence, l’élaboration d’une nouvelle formulation de cannabinoïdes dépasse largement le domaine d’expertise des médecins britanniques. “Nous avons besoin de plus d’expertise – nous avons besoin que nos docteurs soient entraînés et éduqués” déclare la mère de Billy.
Pour remédier à cette situation et défendre ses intérêts, l’industrie du cannabis médical britannique cherche à éduquer elle-même les médecins au cannabis, une mission qui incombe normalement au ministère de la Santé. European Cannabis Holding un groupe de lobby qui regroupe les entreprises à la pointe du cannabis médical britannique vient par exemple de nommer un Conseil Médical. ECH possède également dans ses actifs la plateforme d’apprentissage en ligne The Academy of Medical Cannabis destinée à présenter et à former les docteurs au cannabis médical.
La légalisation modèle luxembourgeoise
Le Luxembourg a légalisé le cannabis médical en juin dernier pour le traitement du cancer, de la sclérose en plaques et des douleurs chroniques. Les professionnels de santé qui souhaiteraient prescrire du cannabis médical doivent suivre une formation obligatoire dispensée par le Laboratoire de Santé Nationale à Dudelange. Une première sélection de 150 docteurs habilités à prescrire du cannabis médical a commencé à le prescrire cette semaine. La formation est ouverte à n’importe quel docteur qui voudrait prescrire du cannabis médical.
La liste des docteurs habilités est ensuite publiée sur le site du laboratoire. Ainsi, les patients qui voudraient se soigner au cannabis savent vers qui se diriger. Munis de leur prescription, ils peuvent ensuite se fournir en cannabis auprès des quatre plus grands hôpitaux du pays. Le médicament est entièrement remboursé par le gouvernement. Tout est ainsi fait pour répondre le mieux possible au besoin du patient.
Le cannabis, un médicament pas comme les autres
Côté luxembourgeois, le cannabis est traité comme un médicament comme les autres. Côté britannique en revanche, malgré le fait que le laboratoire britannique GW Pharmaceuticals soit un pionnier des produits pharmaceutiques au cannabis, une certaine méfiance envers le cannabis persiste. Son statut de “stupéfiant” pèse encore sur son acception en tant que médicament et cela se traduit par une peur des “effets secondaires”.
Le Luxembourg a au contraire une approche beaucoup plus dédramatisée du cannabis. Le pays a d’ailleurs prévu d’en légaliser l’usage récréatif. Le programme de cannabis médical du Luxembourg témoigne de la volonté de rendre accessible le cannabis médical aux patients qui en ont besoin. En Angleterre, cette volonté de démocratisation n’est pas. Le cannabis est considéré seulement en dernier recours et sa prescription est réservée aux spécialistes. Les directives du système de santé national NHS (National Healthcare System) précise d’ailleurs “qu’un nombre extrêmement restreint de patients sont susceptibles d’obtenir une prescription pour du cannabis médical”.
Selon Jon Liebling de l’UPA, les services de santé publics semblent vouloir se déresponsabiliser : “on a l’impression qu’ils n’ont pas vraiment réfléchi au sujet si ce n’est au moyen de se protéger et de se dédouaner de la responsabilité d’avoir à introduire une nouvelle classe de médicament”. Il admet toutefois qu’ils ont cruellement manqué de temps pour établir ces directives. En octobre prochain, le National Institute for Clinical Excellence (NICE) doit publier de nouvelles lignes directrices et il est d’ores et déjà acquis que l’UPA participera au débat. Les besoins des patients seront cette fois pris en considération.
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