Inna de Yard : “Notre message est simplement amour et unité”
Nous avions profité du passage d’Inna de Yard à la Philarmonie de Paris pour les interviewer. Winston et Cedric Myton nous ont gentiment reçus dans une petite maison de la banlieue parisienne, pour parler reggae, spiritualité et ganja.
Le collectif “Inna de Yard” est né de la volonté d’enregistrer des sessions acoustiques directement dans vos arrières-cours, les yards en anglais. Comment arrivez-vous à retranscrire l’ambiance des yards dans vos concerts ?
W : On essaie juste de faire aussi bien que lorsqu’on a enregistré l’album. C’est quelque chose dans lequel on ne met pas d’ego, vous savez ? Il faut se sentir bien en studio. La plupart du temps, même au fil des années, les artistes ont cette peur, vous voyez ce que je veux dire.
Le faire dans une arrière-cour la fait disparaître. Cela permet de toucher la source réelle de la création. Et tu essaies de faire ça le plus possible en studio. Dans tout ce qu’on fait, tous nos concerts… Et nous donnons une place minimale aux instruments, à la guitare, au piano. La plupart de nos instruments ne sont que des percussions.
Vous vous contentez de jouer votre musique sur scène et la laissez agir, jusqu’à ce que les gens écoutent, c’est ça ?
W : Oui, et le beat est très important aussi. Lorsqu’on enregistre, le beat a une énergie différente, une fréquence différence.
Qu’est-ce que les yards permettent par rapport à une session d’enregistrement en studio ?
W : Tu ressens moins de restrictions dans un yard, tu as juste envie d’improviser. C’est aussi pour ça qu’on a enregistré dans les yards.
Et qu’est-ce que vous aimez le plus sur scène ?
W : Lorsque les musiciens jouent bien. C’est une sensation agréable, tout est fantastique, c’est juste toi et le public, c’est à toi de bien faire, d’amener aux gens ce que tu ressens, il n’y a plus de distraction.
Tu as une responsabilité de t’assurer que les gens soient heureux.
Comment avez-vous choisi les musiciens du collectif ? Est-ce que quelqu’un choisit d’ailleurs ?
W : Et bien, les musiciens, c’est quelque chose qui a commencé il y a longtemps. Il n’y avait que nous sur la scène à l’origine [Winston et Cedric Myton]. Maintenant il y a mon fils, notre ami Bo Pee, Cedric Myton et Kiddus I, depuis Inna de Yard.
Est-ce que chacun à son rôle dans votre collectif ? Ou mélangez-vous les positions ?
W : Oui certains ont des rôles spécifiques. Le bassiste, le pianiste, la guitare, mais quelque fois Cedric joue de la basse ou Kiddus. Parfois mon fils Kush aussi.
On change en fonction de la chanson.
Quel est le point commun entre toutes vos chansons ? Quels messages tentez-vous de faire passer ?
W : Notre message est simplement amour et unité. Nous avons quelques chansons de protestation, mais nous protestons d’une manière positive. Nous n’essayons jamais de protester d’une manière négative.
Nous avons des chansons sur la marijuana, certains titres protestent en faveur du cannabis. Ca fait des années maintenant, comme vous et moi, ça ne devrait même plus être une revendication. Si quelqu’un te dit de ne pas manger de chou, et que tu veux en manger, les gens vont te dire : ne fais pas ci, ne fais pas ça.
Je suis un parfait exemple, je fume de la weed depuis mes 9 ans, et aux Etats-Unis, tu ne trouves personne qui est mort de la weed. Mais les gens meurent du tabac et de l’alcool. Mais ils criminalisent la marijuana et disent que tu ne peux pas en fumer, mais c’est là, on n’a jamais vu quelqu’un avoir un cancer à partir de la marijuana.
Nous avons cette grande disparité dans le système sur ce que sont nos droits.
Quelle a été votre plus belle collaboration ?
W : C’est une collaboration qui n’est jamais sortie, avec Mad Professor.
Comment qualifieriez-vous le reggae d’aujourd’hui ?
W : La musique reggae consiste à aller à la source, et la source est le higher binghi. Le higher binghi mène au coeur, et le coeur est à l’origine du temps.
C’est ce vers quoi Inna de Yard va. La source et son ensemble. Nous essayons de revisiter cette source. La recherche du reggae vous mène tout droit à la source je crois.
Les nouveaux artistes sont-ils les bienvenus dans le reggae ?
W : Bien sûr. Alors, il y a un parcours d’initiation. Beaucoup d’artistes arrivent en tant que DJ et commencent à parler de plein de mauvaises choses sur les femmes ou les gays. Mais après un moment, des gens comme Cappleton, qui étaient dans un univers négatif, ils réalisent que des jeunes écoutent. Et si nous disons des choses stupides, les jeunes apprennent des choses stupides, nous avons une responsabilité.
La jeunesse se construit en nous regardant. Si vous ne dites rien qui rendra les gens meilleurs, je n’ai pas le pouvoir de le faire. Mais si c’est quelque chose qui va rendre les gens plus forts, vas-y.
Bob Marley a-t-il encore une influence sur la Jamaïque ?
W : Yeah man. Bob Marley était en avance sur son temps, comme beaucoup d’artistes. Il a chanté des paroles vieilles de 100 ans, et c’est toujours d’actualité. Evergreen lyrics, ces choses ne vieillissent jamais.
C : Tout vient de cette époque, génération après génération. La Jamaïque est à l’avant-garde de ce message de rédemption. Il s’est dispersé à travers le monde entier. Mais la Jamaïque et la musique reggae font une différence. Le reggae est en lui-même révolutionnaire, musical, médical, financier parce qu’il nous permet de faire ce qu’on fait.
Il a été saboté par les entreprises du disque à l’époque. Tant de choses tues restent à dire. L’histoire que nous avons traversée, la passer, et la rendre à la musique.
W : L’oppression ne provoque que l’explosion. Quand on presse quelque chose trop fort, il finit par exploser.
C : C’est un apprentissage au quotidien.
W : La lumière est si forte que les ténèbres finiront par disparaître.
C : Mais… notre message encore une fois est l’amour, plus d’amour, un amour universel et un amour inconditionnel.
Comment vivez-vous votre rastafarisme ?
W : On le vit simplement au quotidien. Dans chaque action, nous essayons d’être bons, d’être sympas avec nos amis.
Vous nous avez dit tout à l’heure que vous buviez de l’alcool ? C’est pas censé être proscrit ?
W : Tout est pour tout le monde. C’est juste la manière dont tu le consommes. Avec modération.
C : Tout ce que tu fais de trop, tu as un problème. Si tu fais trop l’amour, tu auras des problèmes (rires)
W : Oui mon ami, Sonny a eu de gros problèmes avec ça (rires). Oui parce qu’il faisait trop la chose. Il s’est blessé.
Quelle est la place du cannabis dans votre processus créatif ? Dans votre vie quotidienne ?
W : Et bien, la marijuana, à l’origine, est un sacrement, comme les personnes mettent de l’encens dans l’église. Mais nous ne la brûlons pas, nous fumons de la weed.
Ma mère était prêtre à l’église, nous en avons beaucoup parlé. Je lui ai demandé si elle pouvoir dire au Tout-Puissant qu’il était stupide d’avoir créé la marijuana et elle m’a dit “Non, non, non”. Elle n’a jamais eu de problèmes avec la marijuana même si elle était Chrétienne…
Ca ne fait pas de toi une mauvaise personne. Ca ne fait pas voler les gens. Mais ça guérit, et donne de l’inspiration. Si vous êtes une bonne personne et que vous faites de bonnes choses, ça vous rendra meilleur. Et si vous êtes une mauvaise personne, ça vous neutralise. Ca fait s’interroger les gens “je devrais arrêter de faire ces choses”.
Quel est le lien entre spiritualité et musique ?
W : C’est ce pour quoi nous vivons toute notre vie. Depuis notre enfance, nous n’avons jamais vraiment fait attention au côté matériel des choses, on s’est contenté d’être rasta. Même si t’as été une mauvaise personne, tu dois arrêter. Parce que les gens vont commencer à se dire “hé, mais un rasta peut faire ça ?”.
Vous n’êtes plus libre. Même si vous êtes une personne libre qui fait ce qu’elle veut, d’autres vont venir vous voir et dire “Ho comment vas-tu ? Tu es un rasta, ne fais pas ça”.
Des gens qui ne sont pas rasta vous observent pour être sûr que vous faites la bonne chose.
C : La spritualité et la musique font partie du côté mystique de l’église. Certaines personnes chantent, dansent, on y retrouve les mêmes musiques, les mêmes gens.
C’est universel, c’est spirituel, c’est physique, c’est naturel et c’est la musique. La musique est l’une des choses les plus importantes. Comme la langue que nous parlons. Qui nous est donnée. La musique est un développement pour tous. C’est spirituel, c’est physique, c’est rebelle et c’est révolutionnaire.
Encore une fois, nous sommes des individus qui représentons ce que nous faisons. La musique est une des manières les plus importantes pour transcender un message. Qu’est-ce que la musique ? La transmission.
Jusque dans le cœur des gens. Dans les livres, ou dans des films, dans beaucoup de choses, ça a été intégré et révélé jour après jour. Donc nous sommes les personnes qui révélons les choses aux gens, avec nos chansons et les artistes.
Jour après jour, on apprend les uns des autres. L’information vient de tous. Et par la direction que nous prenons, nous essayons d’être révolutionnaires, d’amener de meilleures conditions aux gens.
Les gouvernement oppressent les gens au quotidien, c’est une chose à laquelle nous faisons face. Les autorités pensent qu’elle dominent et contrôlent les gens. Mais il n’y a aucun gouvernement juste dans le monde. Ca n’existe pas. Peut-être dans l’esprit de certains. Tous ces pays, ils se réunissent, et décident pour les gens, qu’ils doivent payer un minimum. Et chaque jour, ils impriment pourtant des milliards de dollars.
Dans le même temps, si vous voulez gagner plus de 500€ par semaine, vous devez aller à l’Université et être sûr de décrocher un diplôme qui vous permette de travailler.
C’est pour ça que tant de personnes vendent de la drogue dans le monde, pour avoir plus d’argent. Parce que ces gouvernements pressent les gens, comme une bombe à retardement, prête à exploser.
Donc nous sommes ici, les musiciens, pour calmer les gens. Ce serait un monde dangereux sans la musique. La musique amène la paix dans l’esprit.
Ca ne vous fait pas bizarre d’être en France, le pays le plus répressif d’Europe sur le cannabis ?
W : Je ne le vois pas comme aussi répressif qu’a pu l’être la Jamaïque avant. J’ai réalisé que beaucoup d’artistes étaient allé en prison pour du cannabis. Bob Marley est allé en prison, et beaucoup d’autres.
En général, nous nous fichons de la répression. Aucun gouvernement ne peut dire que le cannabis est mauvais. S’ils le disent, c’est qu’eux-mêmes sont mauvais.
Je suis un exemple de ça. Vous savez, le cannabis n’apporte que de bonnes choses aux gens. Mais certains en abusent. Même la nourriture, certains en abusent et tombent malades.
Avec tout, la modération est la chose la plus importante. Je bois de l’alcool parfois, mais je ne bois jamais pour être ivre. Je ne perds jamais ma conscience.
Le rhum de Jamaïque est médical. Si vous avez une grippe, vous vous mettez du rhum sur les parties molles de la tête, et en quelques minutes, vous vous sentez mieux. Du rhum à 63°.
Comment était le concert à la Philharmonie?
W : Nous avons vraiment aimé. On a toujours été bien reçu à Paris, moi, Cedric Myton, Kiddus I et tout le projet, ce n’est que du bonheur.
A la fin, les gens nous demandaient même de revenir. Le concert est un peu court mais nous travaillons pour le rendre meilleur.
Est-ce qu’il est trop tôt pour partager un chalice [le chalice est un vaporisateur naturel en bambou et noix de coco originaire de Jamaïque] ?
W : Il n’est jamais trop tôt pour un chalice !
Inna de Yard sera en concert le 27 octobre au Trianon.
Billetterie : https://innadeyard.lnk.to/Trianon
Événement Facebook : https://www.facebook.com/
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