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4 questions à un trader du cannabis

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Alors que le marché canadien du cannabis a récemment vu plusieurs énormes fusions-acquisitions, les valeurs boursières du cannabis se portent plutôt bien. Nous avons donc posé 4 questions à un des experts français du sujet, Antoine Quesnel.

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Comment évolue le marché aujourd’hui ?

A.Q. : Hormis l’indécence du prix du rachat de Cannimed par Aurora, le marché fonctionne aujourd’hui encore comme à l’époque des premières start-ups du Web. Le leader du marché n’a pas été trouvé, et quand les grosses boîtes montent, les petites aussi.

Aurora Cannabis peut finir comme AOL ou Canopy comme le futur Blackberry (les deux ont été des fleurons dans leur domaines avant de disparaître ou presque). Ils ont l’avantage des premiers arrivés sur le marché et de la position de leader mondial de la légalisation du Canada. Mais il pourrait ne rester que 3 ou 4 gros producteurs de cannabis médical à court terme.

Cannimed est un bon exemple de l’évolution du marché, et beaucoup d’acquisitions vont se produire dans les mois à venir (ndlr : le lendemain de l’interview, Aphria rachetait Nuuvera pour +800 millions de dollars).

Si les Etats-Unis légalisent, quelles seront les conséquences pour les valeurs canadiennes ?

Le jour où les USA légalisent, le plus probable est qu’une entreprise américaine pourrait racheter une canadienne pour rattraper son retard. Comme dans l’industrie pharmaceutique ou alcoolière, un rachat à 50 milliards de dollars est tout à fait possible.

Et l’Europe ?

De manière très réaliste, l’essentiel du business du cannabis médical se fait aujourd’hui avec de l’argent ou des produits canadiens. Même Bedrocan, entreprise néerlandaise à la base, a revendu sa filiale canadienne à Tweed, qui est ensuite devenu Canopy Growth.

En Europe, la principale nouvelle réjouissante est que le nombre de patients en Allemagne a explosé. L’industrie y répond à un besoin, avec notamment une commission qui étudie au cas-par-cas si le patient en a vraiment besoin ou non. Mais l’argent repart pour l’instant au Canada, le cannabis distribué vient principalement de là-bas.

Quelques conseils à quelqu’un qui cherche à investir dans le cannabis ?

Mon avis est qu’il vaut mieux chercher la sécurité que le rendement, avec un ETF. Si votre capital est faible et vos connaissances en finances limitées, le plus simple est de tout mettre sur un ETF. Il avait été introduit à moins de 10$ et en vaut aujourd’hui 18.

Avec une deadline canadienne au 1er juillet en raison de la future légalisation, les valeurs devraient prendre d’ici là entre 50 et 200%. Le calendrier fait qu’aujourd’hui, mécaniquement, elles ne peuvent que monter.

On voit déjà  des licornes du cannabis apparaître (ndlr : des entreprises valorisées à plus d’1 milliard de dollars). Canopy Growth a été le premier à entrer sur le Toronto Stock Exchange, l’équivalent du CAC40. On a aujourd’hui aussi Aurora, Aphria…

Mis bout à bout, c’est plus de 20 milliards de dollars canadiens de capitalisation à la bourse canadienne. Le marché canadien de la vente de fleurs est estimé à 4,5 milliards de dollars. Les actions sont donc sous-cotées en ce moment en se basant juste sur la consommation récréative estimée par Deloitte de fleurs à l’ouverture du marché légal. On peut viser un x5 dans les 5 années à venir.

Le principal risque reste les décisions politiques, ou les gros compétiteurs comme la Chine ou les USA. Mais pas l’Europe en raison du manque d’harmonie fiscale et légale.

Le marché a toutefois compris que le mouvement de légalisation était définitif et qu’il faudra compter dessus à partir du 1er juillet prochain.

Et pour les prises de position hors cadre ?

C’est un mouvement plus stratégique. Les plus gros deals se feront le jour où une entreprise pharmaceutique, un laboratoire vétérinaire ou une entreprise agro-alimentaire viendra voir un producteur de cannabis médical.

Ces secteurs ont besoin d’un fournisseur de matière première ultra-fiable, et la fiabilité de la production est du côté canadien, pas américain.

De gros débouchés peuvent apparaître également sur le chanvre. C’est un marché moins visible pour l’instant mais avec des débouchés supérieurs : c’est une plante qui consomme peu d’eau et dont la fibre peut être utilisée de milliers de façons différentes.

Comment investir depuis la France ?

Si on a peu de moyens, on ne passe pas par son banquier car il y a trop de frais. Le boursicotage est aujourd’hui simplifié avec les applications qui permettent de gérer ses comptes-titres, par exemple Saxo, Lynx ou IG.

Pour l’ouverture de son compte, il suffit d’une pièce d’identité, d’un RIB et d’un justificatif de domicile. On crédite ensuite son compte de X€ et on peut acheter directement dans l’appli.

D’un point de vue éthique, j’estime qu’il vaut mieux acheter du canna que du Monsanto (rires). Je conseille plutôt de viser l’investissement que le trading car les courbes sont peu lisibles et que ça reste dangereux avec un petit capital, surtout pour des gens non-initiés. Pour minimiser les risques sur un secteur spéculatif, on s’en tient à l’ETF ou aux quatre ou cinq plus grosses entreprises.

Par ailleurs, je vois un parallèle intéressant aujourd’hui entre le cours du Bitcoin et la valorisation des actions cannabiques : quand le cours du Bitcoin baisse, le Marijuana Index a tendance à augmenter mais il n’y a pas assez de recul pour pouvoir se prononcer sérieusement.

Ce qui est sûr, c’est qu’on a des profils d’investisseurs semblables qui cherchent une grosse rentabilité sur des produits hors-normes. Pour les personnes qui s’intéressent aux cryptomonnaies, ça peut être un bon moyen de diversifier son portefeuille.

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