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Benoît Hamon à ONPC : entre courage et inepties

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Benoît Hamon l’avait déjà déclaré mi-août lors de sa déclaration de candidature à la primaire de la gauche. Il l’a redit sur le plateau d’On n’est pas couché ce week-end. Il est pour la légalisation du cannabis en France, avec une distribution gérée et contrôlée par l’Etat pour lutter contre “l’économie souterraine et les violences”.

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A l’instar de Daniel Vaillant dont il rappelle en fin d’intervention son soutien à la légalisation, Benoît Hamon défend un point de vue qu’on qualifiera pour un certain temps encore de courageux dans une France prohibitionniste. Mais son intervention nous a laissé entre-deux-eaux pour une raison majeure : lorsqu’on parle d’un sujet, il vaut mieux le maîtriser, encore plus lorsque celui qui y touche risque de se faire vilipender par la classe politique entière.

A l’aise sur les questions plus classiques de Laurent Ruquier, de Yann Moix ou de Vanessa Burggraf, Benoît Hamon l’est nettement moins sur cette question du cannabis. Le constat de départ est bon : la France est le pays le plus répressif et celui  qui consomme le plus. Bien. Mais Benoît, nous nous permettons de te tutoyer du coup, voici où tu as fauté :

  • Le THC n’est pas la “substance toxique” du cannabis. Peut-être voulais-tu dire intoxicante, mais pas toxique. Le THC est effectivement le principe actif qui “fait planner”, mais c’est celui aussi qui guérit, le cancer par exemple, et qui peut également traiter nombre de symptômes liés à des maladies graves.
  • Le cannabis serait “légalisé aux Pays-Bas”. Raté. Sa vente est autorisée et contrôlée par les coffeeshops, entreprises sous licences qui sont obligées de s’approvisionner au marché noir, la culture de cannabis récréatif  à disposition des entreprises n’étant pas légale. Pour les citoyens, la possession est dépénalisée jusqu’à 5g et chacun peut faire pousser 5 plants.
  • “22 Etats américains” se seraient penchés sur le sujet. Presque. Ils sont en fait 25 + le District de Columbia, dont 4 qui ont légalisé complètement le cannabis. 5 autres Etats proposent d’ailleurs au vote la légalisation du cannabis début novembre, ce qui porterait à 65 millions le nombre de citoyens vivant dans un Etat américain où le cannabis est légal, quasiment la population française.
  • Tu parles brièvement de “vrais arguments en terme de médecine”, que tu opposes maladroitement à l’argument d’abandon de l’autorité de Yann Moix (on y revient tout de suite 😉 ). C’est important ça, non ? De se dire qu’il y a une plante sur laquelle de nombreuses études scientifiques indiquent des utilisations thérapeutiques efficaces, mais dont l’utilisation est aujourd’hui interdite en France. Tu pourrais nous dire alors que la France a autorisé le cannabis thérapeutique. On te répondrait ensuite que le Sativex, seul médicament à base de cannabinoïdes autorisé, n’est toujours pas commercialisé car le ministère de la Santé bloque sur son prix de vente (Mme Touraine demande 20% du prix proposé par le distributeur, déjà inférieur aux autres pays européens après une première négociation), et qu’aucun autre labo n’ose proposer ses produits de peur de se lancer dans des démarches nombreuses et coûteuses.
  • Yann Moix te dit “légaliser, c’est abandonner l’autorité”, et on te sent décontenancé par cet argument. Tout dépend du point de vue, mais le nôtre est que justement, la légalisation, c’est reprendre l’autorité que l’Etat a laissée aux mains des trafiquants. Et tu le dis en substance, mais cela méritait une déclaration claire et franche en réponse à Moix. Yann parle également de dangerosité du produit. Et c’est bien parce que la consommation de cannabis n’est pas anodine que l’Etat doit la prendre en charge. Comme dirait Sarkozy, l’Europe légifère bien sur la taille des concombres, un produit bien moins dangereux (tout dépend de son utilisation, mais ça…).
  • Et puis tu finis sur une mauvaise note : “il faudrait dépénaliser le cannabis”. Oui. Mais pas que, tu l’as dit toi-même, la dépénalisation ne s’attaque pas au trafic.

Alors c’est bien Benoît, bravo, tu t’attaques à un sujet épineux. Nous ne savons pas encore si c’est dans un but uniquement électoraliste ou si tu y crois vraiment, mais peu importe. En revanche, c’est un sujet qui, nous le croyons, doit être maîtrisé pour pouvoir en parler, au risque d’être attaqué par ses adversaires et tourné au ridicule par les personnes réellement intéressées par le sujet.

Du coup, Benoît, la prochaine fois que tu veux parler cannabis sur un plateau télé, appelle-nous, on t’y préparera (la proposition est sérieuse).

Intervention de Benoît Hamon sur la légalisation du cannabis en France le 3 septembre 2016 sur France 2

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