Cannabis en Europe

CBD en Europe : l’EFSA veut restreindre la consommation à 2 mg/jour

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L’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a lancé une consultation publique sur son avis actualisé concernant la sécurité du cannabidiol (CBD) en tant que nouvel aliment. Publié le 9 septembre, le projet propose une limite de consommation quotidienne de 2 milligrammes par jour pour un adulte de 70 kg, un seuil que de nombreuses parties prenantes jugent excessivement restrictif.

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La consultation (PC 1597), intitulée « Mise à jour de l’avis sur la sécurité du cannabidiol (CBD) en tant que nouvel aliment », se déroule jusqu’au 14 octobre 2025. Elle invite les entreprises, les experts, les autorités publiques et les citoyens à apporter leur contribution, à condition qu’elle soit soumise via la plateforme en ligne de l’EFSA dans le format requis. Après la consultation, l’EFSA pourra ajuster son avis avant de publier une version finale.

Pour le contexte, le Royaume-Uni fixe une limite de 10 mg/jour (précédemment fixée à 70mg/jour), l’Australie à 60mg/jour, tandis qu’au Canada, le plafond est de 200 mg/jour, soit cent fois plus que le chiffre provisoire de l’EFSA.

Selon l’Union des Industriels pour la valorisation des extraits de chanvre (UIVEC), près d’une décennie de consommation de CBD en Europe n’a pas été associée à des problèmes majeurs de santé publique, rendant la limite suggérée « difficile à justifier ».

Incertitudes scientifiques et préoccupations en matière de sécurité

La déclaration actualisée de l’EFSA s’appuie sur une analyse de la littérature scientifique publiée depuis 2021. Malgré l’afflux de nouvelles données, l’agence souligne des lacunes persistantes, notamment en ce qui concerne les effets du CBD sur le foie, le système endocrinien, le système nerveux et la santé reproductive.

Les études animales montrent systématiquement des signes de toxicité hépatique à très haute dose, tandis que les essais cliniques chez l’homme confirment les risques hépatotoxiques lorsque le CBD interagit avec d’autres médicaments. Des inquiétudes subsistent également concernant la toxicité reproductive et les effets sur le développement neurologique lors d’une exposition prénatale.

Afin d’établir une dose provisoire sûre, l’EFSA a appliqué un facteur d’incertitude de 400, deux fois plus strict que la norme habituelle de 200, ce qui a abouti à la limite proposée de 2 mg/jour. Cette valeur a été dérivée de la modélisation de la dose de référence d’études subchroniques, en se concentrant sur les paramètres hépatiques.

Dans son rapport, l’EFSA a en outre conclu que la sécurité du CBD ne peut être établie pour les personnes de moins de 25 ans, les femmes enceintes ou allaitantes, ou les personnes prenant des médicaments concomitants.

Les acteurs du secteur contestent la méthodologie de l’EFSA

Ce chiffre restrictif a déjà suscité de vives réactions de la part de la communauté scientifique. Jérôme Le Bloch, PhD, responsable des affaires scientifiques chez FoodChain ID, a déclaré à NutraIngredients :

« Comme dans les évaluations précédentes, l’EFSA n’explique pas clairement quelles études ont été incluses ou exclues, et ne fournit pas de justification suffisante pour rejeter une grande partie de la littérature examinée. »

Il a également critiqué le fait de se baser sur un seul critère de sécurité et la marge de sécurité inhabituellement stricte :

« La valeur de 2 mg/jour est dérivée d’une BMDL [dose de référence limite inférieure] utilisant un seul critère de sécurité, ce qui est discutable. La limite proposée est extrêmement basse et risquerait de dissuader les consommateurs. »

Le Dr Le Bloch et d’autres consultants appellent les entreprises à partager leurs données de sécurité pendant la période de consultation, dans l’espoir d’influencer la position finale de l’EFSA.

Réglementation du CBD en Europe et au-delà

Actuellement, aucun produit à base de CBD destiné à la consommation orale n’est autorisé dans l’Union européenne en vertu du règlement sur les nouveaux aliments, que chaque Etat membre peut choisir de suivre ou non.

Le seul médicament approuvé est l’Epidyolex, prescrit pour des formes rares d’épilepsie. Fin août, la Commission européenne avait reçu plus de 200 demandes concernant le CBD, dont 17 faisaient l’objet d’une évaluation des risques par l’EFSA.

En France, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (ANSES) est allée plus loin en proposant, au début de l’année, de classer le CBD comme substance présumée toxique pour la reproduction humaine dans le cadre de la réglementation européenne sur les produits chimiques. En Suisse, les autorités recommandent une dose quotidienne maximale de 12 mg, tandis qu’au Royaume-Uni, les régulateurs ont récemment réduit la dose quotidienne recommandée de 70 mg à 10 mg/jour.

Dans ce contexte fragmenté, la consultation de l’EFSA est considérée comme une occasion importante de façonner l’avenir du marché européen du CBD. Les représentants de l’industrie avertissent que sans une approche plus proportionnée, le seuil proposé pourrait nuire à la confiance des consommateurs et entraver le développement durable du secteur.

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