Cannabis en France

Une entreprise alsacienne sort un auto-test urinaire pour le cannabis. Est-ce vraiment utile ?

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A Strasbourg, la société Biosynex a mis au point un auto-test pour “détecter la présence de THC dans les urines”. Il est vendu à l’unité en pharmacie et le mode opératoire est similaire à celui des tests de grossesse. L’idée de l’entreprise est de rendre le dépistage accessible au plus grand nombre et d’en faire une pratique courante pour une consommation plus responsable. De notre côté, ce test laisse songeur.

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A quoi ou plutôt à qui sert ce genre de test?

Marika Raynaud, responsable chez Biosynex explique que “cet auto-test permet en cinq minutes de détecter les dérivés chimiques du cannabis dans les urines et cela pendant un à trois jours en cas de consommation “isolée”, huit à dix jours pour une consommation régulière et jusqu’à 30 jours pour une consommation importante. Le tout avec une fiabilité de 99 %”. “L’intérêt est multiple” affirme la société, ce dont on peut douter.

La société met par exemple en avant l’intérêt d’un auto-contrôle avant de prendre le volant à l’image de alcootest. Or, le dépistage du cannabis dans l’urine ne révèle pas la présence directe de THC dans l’organisme, contrairement à ce qui est écrit sur l’emballage du test. Le THC étant l’élément responsable de l’effet psychoactif, c’est sa détection qui est pertinente pour évaluer le risque. Or dans l’urine, on trouve le métabolite du THC assimilé par foie, le THC COOH. Ce dernier est présent dans l’organisme bien plus longtemps que le THC lui-même, parfois des mois après le dernière consommation en fonction de la fréquence et de l’intensité de l’usage ainsi que de facteurs individuels comme le niveau de graisse dans l’organisme.

Par conséquent, le test urinaire cible la consommation et non l’emprise du cannabis.

Il est ainsi inutile de procéder à ce genre de test pour déterminer :

  • si l’on est sous l’emprise du cannabis, un consommateur sachant quand même s’il a fumé ou non.
  • si un conducteur est apte à conduire, la conduite en ayant du THC dans le corps étant illégale.
  • si un contrôle routier s’avérerait positif. Ceux-ci se font par l’intermédiaire de tests salivaires (le test urinaire est considéré comme une pratique médicale et requiert la présence d’un médecin). Les tests salivaire visent quant à eux à détecter la présence de THC dans la salive. Celle-ci indique une consommation sur les dernières 24 heures environ et n’est pas toujours efficace d’ailleurs.

Ainsi, dans sa promotion, la société rappelle que la consommation comporte des risques mais ne précise pas que le test ne mesure pas le risque mais plutôt les conséquences légales de la prise de risque associée à la consommation d’une substance illicite. Quoique, même en cas d’accidents de la route, la notion d’emprise est déterminée par la concentration de THC dans le sang.

En fait, ce test ne servira qu’à des personnes qui doivent passer un test urinaire pour des raisons professionnelles, académiques ou légales. Une population limitée pour un test qui cherche à se “démocratiser”. Biosynex suggère aussi une autre utilisation : un moyen pour les parents de contrôler si leurs enfants consomment du cannabis. Ou comment rétablir le dialogue familial (ou pas).

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