Cannabis en France

France : l’Assemblée Nationale vote l’amende cannabis

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Edito. L’article 37 de la loi de la programmation de la justice 2018 – 2022 a été voté vendredi dernier à 28 voix contre 14 lors de son examen en première lecture. Traduction : l’usage simple (consommation et transport) de cannabis sur la voie publique pourra désormais être sanctionné d’une amende de 200€, sans supprimer les éventuelles poursuites judiciaires pouvant déboucher sur une peine d’1 an de prison et/ou de 3750€ d’amende.

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Si tant est qu’on ait pu croire à une dépénalisation de fait de l’usage simple de cannabis en France (on compte tout de même 144 000 arrestations par an), la France repénalise ainsi de manière systématique le cannabis, a contrario de la majorité des politiques publiques européennes.

Le parcours aux forceps de l’amende cannabis

Tout avait commencé en 2017 par deux lignes planquées au sein des 82 pages du projet de loi de programmation de la justice 2018 – 2022, dévoilé en mars par la ministre de la Justice, Nicole Belloubet.

La page 41 de ce rapport proposait que l’article L. 3421-1, punissant l’usage illicite des stupéfiants, soit complété par l’alinéa suivant :

“Pour le délit prévu au premier alinéa, y compris en cas de récidive, l’action publique peut être éteinte, dans les conditions prévues aux articles 495-17 et suivants du code de procédure pénale, par le versement d’une amende forfaitaire d’un montant de 300€. Le montant de l’amende forfaitaire minorée est de 250€ et le montant de l’amende forfaitaire majorée de 600€.”

Une “mission d’information tendant à évaluer l’impact d’une application de la procédure de l’amende forfaitaire au délit d’usage illicite de stupéfiant” avait ensuite été formée en août. Brillamment incarnée par Robin Reda et Eric Poulliat, elle prévoyait d’auditionner uniquement des représentants étiquetés gendarmerie / police / sécurité et pénal. Les associations de patients et d’usagers n’avaient été invitées qu’en dernier ressort, pour la figuration.

Les conclusions des auditions étaient claires : le dispositif proposé n’allait pas servir à lutter contre la consommation de cannabis, encore moins chez les mineurs puisque l’amende forfaitaire ne s’applique pas à eux, et peinerait à faciliter le travail policier, ces derniers devant constater l’infraction et délivrer l’amende sur le terrain.

Le seul gagnant de ce dispositif resterait le marché noir, pas du tout impacté par cette amende à destination des consommateurs pris en flagrant délit. Allez comprendre…

Mais qu’à cela ne tienne, les éléments de langage LREM faisaient tous état de la “modernité” et de l'”efficacité” de l’amende.

Le gouvernement avait ensuite enclenché la démultipliée pour passer le texte en procédure accélérée en redéposant un texte du 6 juillet 2017.

Seul changement entre le projet de loi et le texte voté, une diminution de 100€ de l’amende, obtenue après un incroyable combat d’Eric Poulliat, dont il s’est félicité.

Et si l’argument de santé publique avait été mis sur la table pour justifier cette amende, la commission des lois aura fini de l’achever en rejetant un amendement défendu par Robin Reda qui proposait d’assortir l’amende d’informations sur les structures sanitaires. Il ne faudrait pas non plus que les toxicos pensent à se soigner !

L’amende cannabis est-elle déjà en place ?

C’est bien là où le bât blesse. Personne n’est aujourd’hui capable de nous dire quand l’amende cannabis arrivera sur le terrain.

Nous avons pourtant contacté le ministère de l’Intérieur, qui nous a renvoyé vers le Centre de traitement automatisé des amendes de Rennes, qui a transmis notre demande à leur hiérarchie. Nous attendons toujours leur réponse à l’heure où nous écrivons cet article et n’hésiterons pas à vous la donner si elle devait redescendre jusqu’à nous.

Le texte est donc voté mais inapplicable en l’état. A notre connaissance, deux points de doute majeurs subsistent :

  • quelle administration sera chargée de récupérer les amendes
  • qui va payer pour les terminaux de paiement qui serviront à collecter l’amende sur le terrain

Eric Poulliat a donc bien raison de s’auto-congratuler ! En voilà une mission d’intérêt général bien remplie, payée par nos impôts, bénéfique à la société et qui contribuera très certainement à l’amélioration de la santé et de la sécurité publique.

La prohibition du cannabis est un échec acté par tous, renforçons-la !

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