Cannabis en France

Cannabis médical en France : vers l’usage de la plante ou de molécules ?

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Edito. Edouard Philippe, en visite en Creuse la semaine dernière pour valider le Plan Particulier pour la Creuse destiné à revitaliser le département, s’est médiatiquement ouvert au sujet du cannabis thérapeutique. Il serait selon ses mots “absurde de ne pas se poser la question et c’est dans cet esprit que nous voulons travailler avec les porteurs du projet”.

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S’il est surtout absurde d’encore se poser la question de savoir s’il faut soigner des malades, Edouard Philippe se cache adroitement derrière les futures décisions de l’ANSM qui feront suite aux conclusions du Comité Scientifique Spécialisé Temporaire (CSST) qui travaille depuis octobre dernier sur le sujet : “Vous pensez bien que l’avis des plus hautes autorités qui encadrent l’utilisation des médicaments est indispensable.”

Alors qu’en façade cette déclaration du Premier Ministre a été accueillie avec grand espoir, la désillusion n’en est pas moins forte pour les parties prenantes du projet creusois qui s’attendaient à une exception de culture pour le département en attendant qu’elle soit déployée sur tout le territoire. Quant aux personnes malades qui se soignent déjà ou voient dans le cannabis une solution potentielle, leur sort est renvoyé aux calendes grecques, ou au tribunal comme cela arrive encore, voire au cimetière pour ceux et celles pour qui il est trop tard.

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Mais peut-être plus intriguant est le glissement sémantique qui s’opère sous nos yeux. Alors que les premières conclusions du CSST parlaient clairement de l’usage de la plante (“S’entend de la plante de cannabis à l’exclusion des spécialités pharmaceutiques disposant d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) ou d’une autorisation temporaire d’utilisation (ATU)”), l’ANSM n’avait pas pris la peine de le préciser dans sa validation des conclusions du CSST sur la pertinence de l’usage du cannabis à visée thérapeutique. On y trouvait plus largement : “notamment des spécialités à base de cannabis ou de cannabinoïdes disponibles”.

Edouard Philippe est allé plus loin la semaine dernière : “Ce qu’ont dit les porteurs de ce projet est qu’il ne fallait pas s’interdire d’imaginer l’utilisation à des fins thérapeutiques des molécules qui sont contenues par cette plante“. Plus de place à la plante ici, mais seulement à ses molécules.

Si on savait déjà qu’Agnès Buzyn, médecin et ministre de la Santé, a du mal à différencier THC et CBD, Edouard Philippe a-t-il reçu les bons éléments de langage ? Ce n’est pas le seul à parler de “molécule” puisqu’Eric Correia, pourtant plus habitué du sujet, utilise lui aussi le terme dans une interview de France Info. Que s’est-il passé entretemps ? La France se dirige-t-elle vers un usage du cannabis médical sous forme de plante et de spécialités pharmaceutiques ou uniquement de molécules ?

RTL nous aiguille peut-être dans notre questionnement : “Matignon a précisé qu’il s’agissait bien “d’étudier l’utilisation de molécules dérivées du cannabis, dans un cadre thérapeutique, c’est-à-dire pour fabriquer des médicaments””. Les personnes ayant imaginé recevoir du cannabis en pharmacie feraient manifestement mieux d’apprendre le jardinage.

Sans aucun rapport, le CSST devait se réunir en mars dernier pour la seconde phase d’étude du projet “d’expérimentation” du cannabis thérapeutique en France. Cette réunion n’a pas eu lieu, sans que personne n’ait de raison officielle à nous fournir.

Modifications : nous avions indiqué précédemment que le  CSST “devait se réunir le 30 janvier dernier pour la première phase d’étude” et ne l’avait pas fait. Il s’agissait en fait de la réunion de mars pour la seconde phase d’étude. L’article a été modifié en conséquence.

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